Mingus Mathieu Charlebois
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| Sujet: L'eau en bouteille, c'est de la grosse marde Dim 5 Mar - 16:17 | |
| Si vous ne le saviez pas déjà... - Citation :
Le Devoir SAMEDI, samedi 4 mars 2006, p. d4
Bouffe et malbouffe Mettre un peu de vert dans son eau en bouteille
Deglise, Fabien
Boire de l'eau embouteillée, sans que cela soit forcément meilleur pour la santé, pourrait bien s'avérer une activité à haut risque pour l'environnement, pour les générations à venir et pour les habitants des pays en développement, estime le Earth Policy Institute (EPI) dans un rapport rendu public début février.
Cet organisme américain versé dans la promotion d'une économie respirant le développement durable est perplexe. En cinq ans, la consommation d'eau embouteillée a en effet connu une croissance incroyable, passant de 98 milliards de litres en 1999 à 154 milliards de litres en 2004, soit une moyenne de 23,6 litres par Terrien!
Or cet or blanc, poussé par d'imposantes campagnes de publicité et de peur, n'est pas aussi sain et rafraîchissant qu'on veut bien le faire croire. Les vices cachés seraient même nombreux, et il suffit de regarder du côté des ressources naturelles, dont ce produit fait grand usage, pour s'en rendre compte.
Aux États-Unis par exemple, pays numéro un au monde pour sa consommation d'eau embouteillée, les 26 milliards de litres ingurgités l'an dernier ont induit la consommation de 1,5 million de barils de pétrole, et ce, afin d'en tirer le polyéthylène téréphtalate (PET), ce composé chimique entrant dans la fabrication des bouteilles.
À l'échelle du globe, ce sont donc neuf millions de barils de pétrole qui ont participé à ce commerce de l'eau uniquement pour ce qui est des bouteilles, un nombre de barils suffisant pour faire rouler... 600 000 voitures américaines pendant un an.
Et ce n'est qu'un début. Selon le Earth Policy Institute, près d'un quart de l'eau embouteillée transite aussi par camion, par train ou par bateau pour parvenir jusqu'aux consommateurs. Avec, à la clé, une consommation indue d'essence et une importante production de gaz à effet de serre (GES), tenus responsables du réchauffement de la planète.
Un chic qui coûte cher
L'EPI lève d'ailleurs le voile sur quelques aberrations du système. Notons cette eau du robinet du nord de la Finlande, embouteillée et expédiée à 4300 kilomètres de là, en Arabie Saoudite. Fait tout aussi amusant, l'eau de source des îles Fidji, très prisée aux États-Unis mais aussi au Canada pour son «côté chic avec attitude» exotique, qui parcourt tout de même 9000 kilomètres avant de se retrouver sur une tablette à côté d'une eau puisée dans les Laurentides ou au Vermont. Les eaux de table européennes peuvent tout aussi facilement s'exposer à la même critique.
Pourtant, malgré ces quelques travers, le secteur de l'eau en bouteille ne s'est jamais aussi bien porté. Surtout dans les pays en développement, note cet organisme basé à Washington, avec, en tête, le Liban, les Émirats arabes unis et le Mexique, où cette consommation a crû de 44 à 50 % depuis cinq ans, poussée par une augmentation des richesses et la faiblesse des réseaux de distribution d'eau potable.
La chose est facile à comprendre, contrairement aux portraits livrés par les pays développés, où l'eau du robinet n'est plus, sauf certains cas isolés, une source d'inquiétude depuis belle lurette, surtout dans les milieux urbains.
Transformer l'eau du robinet en argent
Les empires de la boisson gazeuse Coca-Cola et Pepsi l'ont d'ailleurs bien compris, eux qui mettent respectivement sur le marché depuis quelques années Dasani et Aquafina. Ces eaux vendues à fort prix sont en effet tirées d'un réseau d'aqueduc public (de l'eau du robinet, quoi!), peut-on lire sur l'étiquette, et sont embouteillées après un traitement qui fait disparaître l'ensemble des sels minéraux pourtant essentiels au bon fonctionnement de l'organisme.
Il fallait y penser, et les géants de la boisson gazeuse ne sont finalement pas les seuls à l'avoir fait puisque 40 % de l'eau en bouteille vendue à ce jour dans le monde logerait à la même enseigne, estime l'EPI. Et ce, même dans des coins comme Montréal, où l'eau sort des robinets avec une qualité irréprochable, assurent en choeur les experts en ressources aqueuses.
À l'autre bout de la chaîne de consommation, le consommateur, justement, ne semble d'ailleurs guère s'en offusquer, lui qui fait grimper les ventes de ces deux produits phares tout en estimant que l'eau en bouteille, minérale ou du robinet, est associée à un mode de vie sain, souligne l'EPI.
Sain? Dans les publicités, oui, et surtout pour l'industrie, qui voit par contre 86 % de ses bouteilles finir aux États-Unis dans des décharges publiques plutôt que dans des centres de recyclage. Mais c'est sans doute le prix à payer, diront les esprits cyniques, pour s'exposer à un marché évalué à près de 100 milliards de dollars par an rien que pour de l'eau en bouteille.
Cent milliards, c'est beaucoup. Et c'est aussi un quart de la somme nécessaire, selon l'ONU, pour donner accès à de l'eau potable d'ici 2015 aux ménages qui n'y sont toujours pas exposés, rappelle l'EPI. Mais comme tout ce qui concerne les notions de santé personnelle et de santé collective, il ne faut pas tout mélanger...
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